22/02/2013
Gluten ou sans gluten, rien n'est simple !
Bon, vous avez lu (ou pas) les épisodes précédents. Vous avez un avis (ou pas) sur la question du gluten. Vous vous demandez peut-être pourquoi certains en font tout un plat ou au contraire vous trouvez que l'on ne prend pas ce sujet assez au sérieux. Je ne vais sans doute pas répondre à toutes vos questions sur ce vaste thème, je souhaite juste vous faire prendre conscience que le sujet est vraiment complexe et peut-être vous amener à réfléchir un peu sur votre relation à certains aliments.
D'abord, voilà un petit schéma pour résumer la situation et vous montrer :
- que les choses ne sont pas tout blanc ou tout noir mais qu'il y a quelques nuances de gris... comme le disait aussi Florence mercredi,
- que cette situation est due à de multiples facteurs.
Le gluten c'est quoi ?
C'est une protéine contenue dans le blé, le seigle, l'orge, l'avoine. Récemment, on a dit que l'avoine était toléré par les personnes intolérantes au gluten. On peut se demander si c'est encore un coup du Dr D. pour vendre son son d'avoine ! (je suis mauvaise langue, en fait, ce n'est pas le même type de protéine !).
A l'une des extrémités du schéma, il y a l'intolérance au gluten ou maladie coeliaque : le fait de manger des aliments contenant du gluten attaque les villosités de la paroi de l'intestin et cela crée douleurs, fatigue, perte de poids, ... Cela arrive souvent dès l'enfance mais aussi potentiellement vers 40 ou 50 ans. Si on a des présomptions d'avoir cette intolérance, il faut vraiment faire des examens sanguins pour le vérifier plutôt que de décider seul(e) d'arrêter le gluten.
Lors d'une excellente émission "Service Public" sur France Inter il y a quelques mois, le professeur Yorham Bouhnik, chef du service de gastro-entérologie à l'hopital Beaujon disait qu'on constate maintenant qu'il y a différents degrés de maladie coeliaque, avec différents symptômes, mais qu'en l'absence de diagnostic avéré, "arrêter le gluten est abusif". Il a vraiment insisté sur la nécessité de dépister d'abord si on pense détecter des symptômes et surtout de ne pas arrêter le gluten de soi-même car ensuite le diagnostic ne sera plus possible, ou vraiment compliqué. Et on risque alors peut-être de se priver à vie du gluten sans bonne raison...
Si vous avez cette intolérance avérée, cela vous prive de certains aliments de base et cela vous oblige à cuisiner le plus souvent (ce qui n'est pas forcement à regretter...) car beaucoup de produits industriels peuvent contenir du gluten. Mais vous avez à votre disposition le riz et la farine de riz, le maïs (et donc la maizena et la polenta), la pomme de terre, le sarrasin (non panifiable mais qui fait de délicieuses crêpes), la farine de pois chiches, ... Et grâce à internet, on peut maintenant avoir accès à une multitude d'idées de recettes et de conseils pratiques.
Une des choses les plus compliquées est aussi de sortir au restaurant. On commence à trouver des infos, des lieux spécialisés. Il y a aussi le très utile site et les actions de l'AFDIAG, l'Association Française des Intolérants au Gluten.
A l'autre extrémité, il y a des personnes, comme moi, qui n'ont pas d'inconfort lié au gluten ou à d'autres aliments et qui mangent de tout. Elles sont libres de supprimer des catégories d'aliments mais elles ont intérêt à y réfléchir, à se demander pourquoi elles le font, à rééquIlibrer avec autre chose si elles éliminent une catégorie entière, ....
Mais je vous disais que la situation n'est pas binaire et, entre ces deux extrêmes, il y a toutes sortes de perceptions qui font que beaucoup de personnes, visiblement de plus en plus, ressentent des inconforts permanents ou occasionnels, intenses ou légers. Les causes sont multiples et complexes :
L'évolution du gluten des aliments
Comme le disait Roland Feuillas dans le billet d'hier, le gluten, par exemple dans les farines qui servent à faire le pain, a largement évolué, est de plus en plus raffiné, est de plus en plus présent. Puis le pain n'est pas forcément le même qu'il y a 50 ans. Cela, il n'est pas certain que notre organisme soit prêt à le supporter... Et le fait qu'on ait une alimentation de plus industrialisée avec souvent la présence de gluten crée peut-être une sorte de saturation...?
Les autres sources d'inconfort
De très nombreuses personnes souffrent d'inconfort intestinal, de mal au ventre, de ballonnements, de digestion difficile. Jusqu'à il y a peu de temps, leur médecin, voire le gastro-entérologue n'y voyait aucune raison physiologique et on a qualifié ces symptômes de "syndrome de l'intestin irritable", de "colopathie fonctionnelle", ... Certains attribuaient cela au seul stress, laissant parfois les patients désemparés, agacés, perplexes. Des recherches, notamment australiennes, ont montré qu'il y a bien certains composants de notre alimentation que nous avons, pour certains d'entre nous, du mal à digérer. Le gluten en fait partie. Mais ne mettons pas tout sur son dos ! Il y a des tas d'autres composants, et on les regroupe sous l'acronyme "FODMAPS" dont je vous reparlerai plus en détail.
FODMAP, ce terme mystérieux, cela signifie de façon barbare, retenez votre souffle : "Fermentable Oligo-Di-Monosaccharides and Polyols" en anglais ou alors "Fermentescibles Oligosaccharides, Disaccharides, Monosaccharides & Polyols. Cela recouvre toutes sortes de molécules présentes dans de nombreux aliments, notamment par exemple (de façon non exhaustive) :
- le fructose de certains fruits (pomme, poire, ...) et présent dans de nombreuses boissons et produits transformés,
- les fructanes présents dans les oignons, l'ail (en quantité), certains légumes,
- les polyols qu'on trouve dans de nombreux produits "sans sucre": chewin gum, bonbons, ...
Chez certaines personnes, certaines de ces molécules sont mal digérées et fermentent dans le système digestif créant un inconfort plus ou moins intense. Parmi tous ces produits, ceux que l'on tolère plus ou moins sont très variables selon chaque personne. Il n'est donc pas question d'éliminer "sauvagement" tel ou tel aliment mais de mener éventuellement une observation attentive puis éventuellement de faire l'expérience d'une période où l'on arrête un aliment suspecté.
Le système intestinal et le microbiote
Notre organisme aussi joue un rôle bien sûr. Notre système digestif, qu'on appelle maintenant le "deuxième cerveau" est d'une immense complexité, encore partiellement méconnue. Et il englobe ce qu'on appelle le microbiote, qu'on nommait avant la "flore intestinale". Un monde microscopique, très peuplé (des milliards de bactéries), pas encore très bien connu non plus et propre à chacun. La tolérance plus ou moins grande de notre système digestif aux aliments, elle peut être due à de multiples facteurs, qui vont de la façon dont la mère a accouché (la césarienne joue un rôle) à la prise d'antibiotiques en passant par l'alimentation, ...
Si vous voulez explorer un peu ce monde mystérieux, vous pouvez notamment écouter La Tête au Carré justement sur France Inter cette semaine.
L'interaction entre l'alimentation et le système digestif de chacun est complexe et unique !
Les habitudes alimentaires
Parfois, par facilité, on va incriminer tel ou tel composant car cela parait simple de l'éviter. Mais quelquefois il serait plus utile et adapté de prendre du recul sur ses habitudes alimentaires. Est-ce qu'on a une alimentation très riche qu'on digère mal, est-ce qu'on manque de fibres facilitant le transit, est-ce qu'on mange à toute vitesse sans beaucoup mâcher rendant la digestion pénible, est-ce qu'on mange en quantité exagérée et qu'on sort de table en se sentant plus que rassasié... ? N'est-ce pas tout cela qu'il faudrait regarder de plus près ?Je me suis ainsi amusée (si on peut dire) de ce dialogue entendu entre deux jeunes femmes au Café Pinson :
L'une : "j'ai arrêté le gluten parce que quand je mangeais beaucoup de pain, j'avais mal au ventre !"
Réponse de l'autre : "mais si tu manges beaucoup de pain sans gluten, tu auras probablement mal
au ventre aussi !"
Il m'est ainsi arrivé de recevoir des personnes qui se plaignaient d'avoir mal au ventre après avoir avalé une baguette de pain entière à toute vitesse... En réapprenant à manger doucement et en quantité adaptée, le mal de ventre a disparu...
La psychologie
Il y a des personnes qui décident du jour au lendemain de se priver des aliments sources de gluten et qui tout à coup se sentent tellement mieux... Est-ce que ce ne serait pas leur tête plutôt que leur corps qui leur dirait cela ? Alors qu'elles ont mangé du pain, des pâtes, des biscuits pendant des années sans aucun inconfort. Que sont leurs motivations ? Comme le dit Florence, c'est parfois reprendre une forme de maîtrise. Comme l'a évoqué Gérard Apfeldorfer dans un très intéressant article de Psychologies, la distance de plus en plus grande avec les composants de notre alimentation, la méconnaissance des modes de fabrication, les inquiétudes générées par ce côté abstrait (cf la récente "crise des lasagnes") génèrent des peurs et nourrissent cette envie de maîtrise.
Pour certaines autres personnes, c'est probablement l'attirance pour une mode qui va passer plus ou moins vite, être remplacée par une autre. Mais elles peuvent parfois être influencées par les tendances venues des Etats-Unis et propagées par quelques vedettes. Mais aux Etats-Unis, se sent-on mieux parce qu'on a arrêté le gluten ou parce qu'on a arrêté la junkfood ?
Alors bien sûr cette tendance participe à une meilleurs prise en compte de la maladie, notamment par les industriels qui ont vite flairé une tendance potentiellement rémunératrice. Mais a-t-on vraiment envie d'être la "victime" crédule de leurs argumentaires commerciaux ?
Cela peut bien sûr faciliter la vie des intolérants. Mais ce qui m'agace, c'est que cela semble banaliser la vraie souffrance des personnes qui ont une intolérance au gluten (ou maladie coeliaque) diagnostiquée et qui rêvent peut-être, elles, de pouvoir manger autrement. Quand la part de mode sera passée, ces personnes vont continuer à souffrir, pensera-t-on moins à elles alors ?
En fait, si vous devez retenir une chose, c'est vraiment que chaque personne est unique et devrait, plutôt que prendre des décisions basées sur des discours généraux, surtout apprendre à s'écouter et bien se connaître, et faire appel à des professionnels compétents et des examens adaptés si besoin.
Visuels © jas et © ivolodina - Fotolia.com (le schéma du haut est de moi)
08:03 Publié dans Bien-être sans régime, Du côté des aliments, Fondamentaux | Lien permanent | Commentaires (24) | Tags : gluten, glutenfree, alimentation sans gluten, no gluten, intolérance au gluten, maladie coeliaque, fodmap, syndrome de l'intestion irritable, colopathie fonctionnelle, digestion, pain | | Facebook | | Imprimer
20/02/2013
Parlons du gluten : la parole à Flo "Makanai"
Sur ce sujet complexe et controversé du gluten dont je vous parle cette semaine, j'ai décidé de donner la parole à deux personnes concernées de très près.
D'abord Flo "Makanai". Florence tient depuis plusieurs années (elle a récemment fait une pause puis repris un peu différemment) un blog très riche, plein d'informations, de conseils et de recettes à l'intention des personnes ayant une intolérance alimentaire, car elle-même a dû affronter cette situation au sein de sa famille. Elle a acquis des connaissances pointues sur le sujet, qu'elle a aussi partagé dans un livre vraiment très bien fait sur le sujet.
- manger "sans gluten" est un moyen comme un autre pour beaucoup, de se (re)focaliser sur leur propre personne. La vie va si vite et est si complexe que nous allons plutôt mal (stress, déprime, fatigue et maladies physiques...). Nous avons l'impression de n'avoir que peu de contrôle sur tout cela. Nous avons envie de reprendre les rênes de nos vies, d'en redevenir acteurs... Quelle meilleure façon de se remettre au centre de ses propres préoccupations, de son monde, que de surveiller attentivement ce que l'on va manger, se faire à manger ? Je crois vraiment qu'en ce sens, le "sans gluten" est un régime parmi des dizaines d'autres, particulièrement attractif pour ceux qui ont besoin de vérifier que seul ce qu'ils veulent rentre dans leur corps.
2. Quels sont les avantages et les inconvénients de cet engouement pour les personnes atteintes de la maladie coeliaque ?
Les avantages : un meilleur étiquetage alimentaire, une offre bien plus importante de produits "sans", une meilleure considération de leur maladie, des moyens mis en place pour aider leur participation à la vie en collectivité (admission dans des cantines avec menus "sans", par exemple)...
Les inconvénients : Le premier inconvénient auquel je pense n'est pas dû à l'engouement en tant que tel mais aux réactions de tous ceux qui se permettent de décréter que le "sans gluten" n'est qu'une mode sans fondement, juste parce que le gluten ne leur fait aucun effet. Ces réactions nourrissent le mépris envers les intolérants au gluten, et plus généralement envers ceux qui mangent "autrement". C'est très dommage. Le deuxième inconvénient est que ceux qui crient haut et fort être intolérants au gluten mais qui mangent toutefois et en public des aliments qui en contiennent quand cela leur chante, alimentent l'idée que tout cela n'est que balivernes...
3. Comment souhaiterais-tu que la situation évolue concernant le gluten ?
08:15 Publié dans Bien-être sans régime, Pistes pour bien manger | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : gluten, sans gluten, maladie coeliaque, maladie céliaque, intolérance au gluten, manger sans gluten, allergies | | Facebook | | Imprimer
21/02/2010
Polenta aux champignons : plaisir gourmand du 20 février
La première fois que j'ai mangé de la polenta, c'était en classe de neige, en Suisse, j'avais 8 ou 9 ans. Il s'agissait d'une masse molle et gluante, j'avais trouvé cela infâme ! Puis j'ai eu l'occasion d'en manger en Italie et j'ai découvert la vraie polenta, d'une tout autre saveur et consistance, beaucoup plus ferme. J'en mange parfois à la maison car la cuisine italienne est assez présente chez nous et maintenant j'aime beaucoup ce plat. Cela montre qu'il ne faut pas rester sur une première impression d'un aliment, surtout quand on le goûte dans des conditions non optimales (cantine, ...). Il ne faut pas hésiter à le goûter à nouveau, voire à le cuisiner soi-même.
La polenta est un plat très facile à préparer, on fait juste cuire la semoule de maïs avec de l'eau en remuant jusqu'à la consistance adéquate, puis on peut l'associer à de multiples plats. C'est un mets qui s'accomode très bien avec des viandes en sauce, par exemple du veau aux champignons, de la daube, mais on peut aussi l'associer à des légumes ou de la sauce tomate et faire gratiner un peu de fromage dessus.
Samedi, c'était simplement des tranches de polenta avec une poëlée de champignons variés. Un plat peut-être plus automnal qu'hivernal (le congélateur a participé) mais en tout cas délicieux.
A noter que, pour des personnes végétariennes ou intolérantes au gluten, c'est un aliment qui permet d'introduire un peu de variété dans les menus et de préparer des plats savoureux.
NB : afin de vous encourager à prendre plaisir à manger le plus souvent possible, je vous donne chaque jour un plaisir gourmand personnel. N'hésitez pas à poster un commentaire si vous voulez une recette détaillée, une adresse,... ou faire une suggestion gourmande.
09:06 Publié dans Plaisirs gourmands | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : alimentation, cuisine, diététique, nutrition, légumes, féculents, polenta, hiver, italie, végétarien, intolérance au gluten | | Facebook | | Imprimer