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11/12/2017

Ryoko Sekiguchi, éternelle curieuse des mystères du goût et gourmande BCBT*

Connaissez-vous Ryoko Sekiguchi ?

ryoko sekiguchi,manger fantome,fade,gastronomie japonaise,goumande bcbt,auteure japonaiseSi vous êtes passionné(e) de Japon et de gastronomie, peut-être... Je ne me souviens plus comment j'ai découvert cette délicieuse auteure, poétesse et traductrice, qui écrit des livres souvent modestes par la taille mais essentiels par le contenu. Elle a développé une passion pour la nourriture, objet de plusieurs de ses livres, d'articles, de conférences... Ryoko Sekiguchi a le grand talent d'écrire sur des sujets familiers mais d'y porter un regard tout à fait singulier. J'ai lu notamment le Manger fantôme, adoré sa collecte d'écrits japonais gourmets Le Club des Gourmets. Je me suis aussi plongée avec délice dans Fade : elle y trace avec délicatesse et malice une frontière entre Français et Japonais. Souvent créatrice d'événements originaux, elle avait d'ailleurs imaginé un dîner autour cette notion, qui m'avait fait découvrir avec bonheur le restaurant L'Inconnu. Hier dimanche, elle était au Centre Pompidou de Metz pour une "performance" autour de l'Humide. Ryoko Sekiguchi, sans cesse en partance pour d'autres contrées, avait très gentiment accepté de prendre un moment pour répondre à mes questions il y a quelques semaines. Ses réponses confirment son tempérament curieux et son lien singulier au manger. Merci encore Ryoko pour ces confidences !

Votre définition de la gourmandise

Prendre du plaisir à manger tout simplement. Mais ce n'est pas un mot que j'emploie beaucoup.

Votre gourmandise favorite

L'amertume des herbes, des légumes ! Les artichauts, les petits pois croquants, les jeunes pousses. Ce qui annonce le renouveau au printemps.

Votre dernière découverte gourmande ?

Je me surprends à découvrir le sucré. Ce n'était pas du tout mon goût et il est surprenant de voir comme le goût d'une personne peut changer. En fait, ce n'est pas tout le sucré, mais un goût pour la pâtisserie orientale, que je pense lié à mon attachement pour cette région du monde, à Alep, et aux souvenirs que j'en ai. Comme un effort pour renouer un lien. Quand mon goût change ainsi, je me demande pourquoi. En écrivant, tout fait sens.

Le plat / l’aliment que vous ne parvenez absolument pas à aimer

J'ai décidé que je mangerais tout. Je me suis fixée une règle : je goûte tout si quelqu'un me le propose, me tend la main avec un aliment, un plat.

Vous partez sur une île déserte, l’aliment que vous emportez absolument

Des oignons (bulbes) de safran. Il y aura forcément à manger, du poisson, du sel. Le safran, c'est beau, ça va avec beaucoup de choses...

Que consommez-vous sans modération ?

Les artichauts, les asperges, j'adore ça sous toutes leurs formes, je pourrais en manger tous les jours !

D’où vient votre tempérament gourmand ?

De ma mère. Pour plusieurs raisons. Elle était cuisinière et avait une école de cuisine. Je n'aimais pas du tout cuisiner petite car je ne recevais jamais de compliment, elle trouvait toujours quelque chose à redire. Mais son école était entre le lycée et la maison. Du coup, j'y passais du temps en rentrant des cours et j'écoutais les conversations de toutes ces femmes, qui se retrouvaient là dans une sorte d'espace de liberté. C'était ça pour moi la cuisine, la rencontre, l'échange, la parole libérée.

A la maison, c'était épuisant car elle passait son temps à tester sur nous ses nouvelles recettes pour ses cours. Donc on mangeait plusieurs jours de suite le même plat. Mais en même temps, c'était une vraie militante bio très active. On mangeait vraiment de bons produits et je voyais bien que ce n'était pas forcément le cas chez mes amies. Elle était proche des producteurs, on les connaissait par leur nom, on finançait "notre" pommier, qui nous fournissait des pommes, "notre" cochon...

Votre gourmandise inavouable ?

En hiver, quand il fait très froid, tard le soir, si je reviens d'un concert et que je n'ai pas dîné, je peux m'arrêter dans un café pour prendre... une barquette de frites !

La cuisine, c’est quoi pour vous ?

C'est un moyen de me vider la tête, de passer à autre chose que mon travail qui m'occupe beaucoup.

Dans vos placards (et frigo), il y a toujours… ?

Ah ah, mon frigo est plein à craquer. De toutes sortes de condiments, du marc de saké, différents miso, des sauces, des produits fermentés. J'utilise beaucoup la fermentation. Et je réalise des sauces selon les ingrédients du moment. Par exemple, il y a quelques jours, j'avais de la sauge, j'ai fait un bocal de sauce à la sauge cuite selon une recette qu'avait publiée Elisabeth Scotto.

Les étagères qui me servent de placard dans ma petite cuisine sont également remplies de nombreux épices, des sauces soja, toutes sortes d'huiles, de vinaigres... L'assaisonnement a un côté rassurant pour moi. Je sais que, quoi que j'achète, j'arriverai toujours à préparer quelque chose de bon, pour moi ou pour des invités.

Votre madeleine de Proust, le goût que vous n’arrivez pas à retrouver ?

 Ma mère faisait des prunes au sirop quand j'étais petite et il est impossible de retrouver ce goût. Je lui ai demandé d'en refaire à l'identique mais ce n'est plus pareil, sans doute les prunes ont-elles changé.

Votre recette super-express et super-bonne ?

Ma sauce trois tiers 1/3 saké, 1/3 shoyu (sauce soja), 1/3 mirin, fait merveille. Par exemple pour faire sauter du canard si j'ai du canard (le gras du canard se marie à la sauce), ou avec des œufs, ou pour faire sauter des légumes. Je me débrouille toujours, je pourrai tenir un siège avec tout ce j'ai chez moi !

Quand je reçois des invités, j'ai pour principe de toujours cuisiner des plats que je n'ai jamais faits : ce sont mes cobayes ! Je connais mes propres goûts et je mange ce que j'aime. Donc, quand j'invite, cela me permet d'explorer autre chose, cela a un rapport avec l'imagination des autres, je pense à ce qu'ils pourraient aimer.

ryoko sekiguchi,manger fantome,fade,gastronomie japonaise,goumande bcbt,auteure japonaiseL’effort que vous faites pour votre ligne ? C'est quoi les régimes pour vous ?

Il y a des années, j'étais plus grosse que maintenant d'une dizaine de kilos et j'ai eu une période où je suis devenue obsédée par ce que je mangeais, par les calories, j'ai eu alors des variations de poids. Ça s'est complètement arrêté quand j'ai commencé à écrire sur le goût. La nourriture est en lien avec le plaisir désormais. Je n'ai plus de problème avec mon corps. Je peux avoir une variation de quelques kilos sans problème, ça se régule tout seul, j'aime mon corps car il est fait de bonnes choses !

Quand je mange, je suis tranquille, je sais m'arrêter. Je ne me prive pas, je m'écoute, je me fais confiance et je constate que mes envies varient selon mon état. Parfois, quand je suis très en forme, que j'ai de l'énergie, j'aime l'idée d'abondance d'un bon plat de bistrot, d'un ragoût. Parfois, la sérénité vient d'un plat minimaliste, par exemple du tofu un peu chauffé avec de la sauce soja. J'aimerais qu'il y ait des restaurants pour les gens qui ne sont pas en forme, où l'énergie limitée qu'on a n'est pas prise par la digestion des plats... J'aimerais ainsi bien manger jusqu'à la fin de ma vie !

Votre meilleure façon de bouger ?

La trottinette ! 

Une astuce gourmande pour embellir le quotidien ?

Prendre en photo ce qu'on mange. Parce qu'alors, on fait un effort de présentation, on a envie que ce soit joli, on choisit une belle assiette...

*BCBT : Bien dans son Corps, Bien dans sa Tête

Si vous voulez découvrir d'autres gourmandes BCBT, c'est ici

19/11/2014

Au Japon, on est omnivore ! (épisode 1 : le poisson)

Il y a quelques semaines, je vous parlais de ma tendance flexitarienne, de mon éloignement du poisson et de la viande en cuisine. Rien de changé à cela mais quand on est en voyage, on se plie aux us et coutumes locaux. Et, au Japon, difficile d'éviter le poisson et, dans une moindre mesure, la viande. Mais ce fut avec plaisir !

Outre Tokyo, nous avons fait un périple dans le Kyushu, la partie du Japon la plus au Sud (outre Okinawa). Nous étions souvent près de la mer et donc de ses ressources naturelles, poissons, coquillages et crustacés. C'est bien sûr cette proximité quasi-permanente avec la mer qui a façonné les habitudes alimentaires japonaises, avec une présence importante du poisson.

- Il y a le poisson grillé, incontournable de tout petit déjeuner traditionnel, souvent du saumon mais aussi d'autres poissons, selon la région et la saison, dont il faut se saisir bouchée par bouchée avec les baguettes si possible élégamment !

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- Il y a le poisson cru de première fraîcheur au bord de la mer ou tout proches, en sushi (à un comptoir) ou en sashimi (pendant un repas).

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- Il y a aussi la crevette, élément central d'un assortiment basique de tempura, le poisson et les coquillages qu'on fait mijoter. Il y a aussi le délicieux accord doux-acide des oursins et des œufs de saumon. Il y a enfin l'anguille grillée qu'on trouve par hasard en poussant la porte du seul restaurant visible dans un coin isolé d'une petite ville.

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Et c'est toujours un bonheur du voyage de profiter des mets locaux.

16/01/2013

Et on mange quoi en hiver au Japon ?

Partant pour la première fois au Japon en hiver, j'étais curieuse de voir si la période froide recelait quelques particularismes culinaires dans ce pays si attentif au rythme des saisons. En fait, les grands classiques de la cuisine japonaise dont je vous parlais hier sont présents en toute saison. On n'a d'ailleurs pas vraiment constaté de changement dans le type de plats servis : il y a toujours du cru, du mijoté, du grillé, du bouilli, du frit...

En revanche, on a découvert ou consommé de façon accrue certains produits de la mer dont c'est la saison privilégiée. Ainsi, la star incontestée de cet hiver a été le "buri", un délicieux poisson gras, qui est une variété de "yellowtail" aux Etats-Unis, qui correspond à la sériole en France. En fait, ce poisson a différents noms au Japon selon sa taille : les sérioles de moins de 50 g sont appelées "mojako", celles de 50 g à 5 kg "hamachi" (on en a mangé aussi) et celles de plus de 5 kg "buri" (source FAO). En quelques jours, on l'a nous servi en sauce teriyaki dans une petite "cantine" de quartier, grillé dans une izakaya, en sashimi... Et ce fut toujours excellent.

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D'autres délices maritimes furent très présents et je m'en suis régalée, à ma grande surprise, car c'étaient des mets que j'avais peu appréciés jusqu'à présent, pour des questions de goût ou de texture : les laitances de poisson (blanchâtres, moelleuses et onctueuses), un mets dont les Japonais sont friands mais qu'à ma connaissance, on ne trouve pas en France ; le foie de lotte qui s'est avéré plusieurs fois un délice, fondant sans être pâteux et goûteux mais pas trop fort.

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Côté légumes, on a rencontré moult champignons, beaucoup de racines de lotus (plus que d'habitude ?), des carottes, divers légumes-racines, fougères, ... pas toujours identifiés.

Les fruits, j'y reviendrai demain.