06/05/2015
J'ai lu Guy Birenbaum et... j'ai été touchée
Vous avez peut-être entendu parler du livre de Guy Birenbaum, Vous m'avez manqué, histoire d'une dépression française : il a eu des critiques dans le presse et été il y a quelques semaines invité de plusieurs plateaux télé. Ce journaliste-blogueur raconte un an de sa vie, son plongeon dans la dépression, les racines de ce mal dans son histoire personnelle et comment il s'en est sorti. J'ai eu envie de le lire car je le suis avec intérêt depuis un certain temps en ligne. Et de vous en parler. Rien à voir avec mon domaine, direz-vous ? Eh si, quand même...
J'ai beaucoup aimé ce livre et je l'ai dévoré (eh oui, parfois je dévore plutôt que je ne savoure !). Il a résonné avec plusieurs de mes réflexions/convictions :
- la principale raison pour laquelle il a écrit ce livre : dire, même si cela parle ne serait-ce qu'à une personne, un lecteur, qu'on peut s'en sortir, qu'il ne faut jamais renoncer à aller mieux, même si on a l'impression qu'on est à bout, au fond du trou. Comme lui-même a trouvé une lueur dans un livre de Philippe Labro. Cela fait écho à ce que je répète souvent à mes patients qui sont dans des difficultés, en particulier alimentaires, depuis vingt ans, trente ans voire davantage et qui ont perdu tout espoir de s'en sortir, qui sont totalement désespérés de cette obsession qui leur gâche la vie : non, il ne faut pas renoncer, même si cela peut être long, difficile, avec des rechutes, il faut garder toujours en tête qu'il y aura un jour une lueur, les bons mots, la bonne personne, le bon livre, et que, pas à pas, on pourra avancer vers un mieux-être.
- il a osé demander de l'aide, il a trouvé un thérapeute qui l'accompagne, avec une attention et une compréhension essentielles. Il a sans doute eu de la chance, été conseillé par des amis ayant un bon réseau de relations. L'important n'est pas que la personne soit célèbre, reconnue... mais qu'on ait le bon "feeling" avec elle, qu'on ressente qu'on va pouvoir faire un bout de chemin ensemble, qu'on se sente écouté et compris. Je rencontre parmi mes patients beaucoup de personnes qui ont eu un long chemin de psych... et sont assez désabusées sur le sujet. Mais peut-être n'était-ce pas la bonne personne alors (sûrement plus importante que l'approche, l'école de pensée..)
- il reconnait en parallèle l'apport indispensable d'un traitement médicamenteux. Je suis vraiment très loin d'être une apologiste des médicaments mais je sais combien ils peuvent être utiles dans certains cas, à condition de trouver la bonne molécule :
- soit de façon temporaire pour rétablir un équilibre perturbé, physique ou mental,
- soit de façon permanente car on a vérifié que le mental n'était pas capable de s'équilibrer tout seul. Souvent, les personnes rechignent, craignent une dépendance. Mais il faut se rappeler que le cerveau, c'est beaucoup de chimie et que, quand il a un déficit de façon naturelle et irrémédiable qui gâche la vie, il est logique de rétablir l'équilibre et un fonctionnement harmonieux par un apport extérieur. Pourquoi l'accepte-t-on plus facilement quand il s'agit du pancréas ou de la thyroïde?
- il est sorti du contrôle mental permanent et quantificateur : Guy Birenbaum était du style à courir tous les jours la même distance en observant ses performances, à se peser quotidiennement, à être très attentif aux calories qu'il absorbait. Cet épisode lui a permis de se rendre compte de l'enfermement et de la pression que cela représentait et il est revenu à une vie plus "naturelle" et intuitive me semble-t-il : écouter son corps et profiter du moment présent. C'est ce que je propose à mes patients : abandonner peu à peu (cela peut prendre un peu de temps quand c'est profondément ancré) le contrôle mental et quantifié du comportement alimentaire, trouver son juste poids en écoutant son corps, se sentir bien dans son corps sans se focaliser sur le chiffre qu'indique la balance.
- un des éléments (un symptôme, pas une cause) de son parcours est son comportement addictif vis-à-vis des réseaux sociaux pendant une période et cela me parle : je ne suis pas de tempérament addictif a priori mais je me rends compte que la modération m'est difficile dans le domaine d'internet et de twitter en particulier : je n'ai aucun mal à m'en passer pendant une période même longue mais quand je me connecte, j'ai souvent tendance à y consacrer trop de temps...
- et aussi pour des évocations plus personnelles autour de la communication familiale.
La lecture de ce livre m'a aussi fait penser à la si belle chanson de Barbara, le Mal de Vivre.
08:22 Publié dans Activités, medias, lectures... | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : guy birenbaum, vous m'avez manqué, dépression, burnout | | Facebook | | Imprimer
Commentaires
C'est un ouvrage qui m'intéresse beaucoup, parce que mes parents ont connu la dépression, parce que j'ai moi-même du y faire face, et avec des médicaments pendant une période, le temps de remonter une pente qui paraissait trop raide.
Je crois que trouver son équilibre est un exercice très difficile, qui demande du temps et qui reste très fragile : de l'importance de savoir s'écouter et d'apprendre à être bienveillant avec soi-même.
Écrit par : Miss Alfie | 06/05/2015
Ça me donne très envie de le lire. Je n'ai jamais connu ce par quoi il est passé mais je suis très intéressée par le sujet !
Écrit par : Julie | 06/05/2015
@Miss Alfie merci de votre message, prenez soin de vous et en effet l'auto-bienveillance est impprtante.
@Julie je confirme qu'il n'est pas nécessaire d'être passée par une dépression pour apprécier le livre. Je n'ai jamais eu à souffrir de cela personnellement mais je suis très sensible à la fragilité humaine...
Écrit par : Ariane | 06/05/2015
Merci Ariane pour cet article qui nous rappelle des choses essentielles. Oui, les changements prennent du temps et se font petit à petit, insensiblement, car nous sommes ainsi faits que nous nous transformons en permanence, chaque jour légèrement différents de ce que nous étions la veille et de ce que nous serons demain. Et cela prend parfois une vie pour trouver l'équilibre. Mais lorsque l'on se rend compte que l'on va mieux et que l'on a atteint son but il apparaît aussi que chaque étape avait son importance et était nécessaire probablement. Alors oui, ne jamais renoncer, poursuivre patiemment ce cheminement à la découverte de soi, cela en vaut la peine. Je pense aussi que l'écoute et la bienveillance envers soi sont des clés pour accéder à un mieux-être. Belle journée :-)
Écrit par : Adkoe | 08/05/2015
@Adkoe merci beaucoup de ces réflexions. Oh oui, écoute et bienveillance envers soi et envers les autres :-)
Écrit par : Ariane | 09/05/2015
Effectivement si ce livre peut aider au moins une personne, ce sera une très belle chose.
Il est impératif de trouver la bonne personne, et il faut s'accrocher ça n'est pas facile !
Il ne faut pas non plus hésiter de conseiller à ses poches de se renseigner sur la dépression. Ça leur évitera de dire bien des bêtises qui pourraient au pire vous blesser, au mieux être inutiles.
Et il faut aussi savoir que ce peut être très long de s'en sortir. Un an, c'est rapide !
Écrit par : Mag à l'eau | 10/05/2015
@Mag à l'eau merci, oh oui, je suis bien d'accord
Écrit par : Ariane | 12/05/2015
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